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Le covid-19 en chiffres
(27/04/2020)
(mise à jour 01/05/2020)



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Vous vous rappelez sans doute que lorsqu'on a imposé le confinement, on annonçait que la maladie avait un taux de létalité de 2%, et que 10% de personnes atteintes nécessitaient des soins intensif... Des chiffres qui avaient de quoi faire peur. Mais il s'est rapidement avéré qu'ils étaient très surestimés, essentiellement parce que de nombreuses personnes ayant été contaminées ne présentent pas ou peu de symptômes. Voyons quelles ont été les avancées de nos connaissances au sujet des principaux chiffres.

Nombre de contaminés

On savait depuis longtemps que le nombre de personnes atteintes répété partout était très en-deçà du nombre réel, parce que n'étaient testées que les personnes se présentant à l'hôpital et ayant des symptômes de la maladie. Donc dès le 15 mars on savait qu'il fallait multiplier par au moins vingt le nombre de cas « confirmés » pour avoir le nombre réel de contaminés.

Le 22 mars, le gouvernement a annoncé qu'effectivement on ne connaissait pas le nombre réel de personnes infectées, mais qu'il était compris entre 30 000 et 90 000, ce qui était clairement un grossier mensonge !

Comment estimer le nombre réel ? À ce moment-là, il y avait à peu près 16 000 cas confirmés en France, et on disait que le virus avait un taux de létalité d'environ 2%. Donc a priori il suffit de multiplier le nombre de morts par 50 pour avoir le nombre de cas... Il y avait ce même jour 674 morts, en multipliant par 50 on trouvait 33 700 porteurs du virus... C'est apparemment ce que les super-conseillers du gouvernement ont fait, en tenant compte en outre qu'on disait à l'époque qu'il y avait jusqu'à deux fois plus de porteurs asymptomatiques, non comptabilisés.

Mais le raisonnement est idiot, pour la simple raison que quand on meurt de cette maladie c'est en moyenne 19 jours après l'avoir contractée. Et les contaminés ne sont comptés qu'après une période d'incubation d'environ cinq jours, il y a donc un décalage de 14 jours entre l'apparition de la maladie et la mort. Et donc il faut comparer le nombre de morts avec le nombre de cas confirmés quatorze jours auparavant. Nous avions alors 674 morts le 22 mars, et 1126 cas enregistrés le 9 mars, alors qu'on aurait dû en avoir 33 700 si le virus avait un taux de létalité de 2%. Il fallait donc multiplier par trente, et pas par deux à six, il semble que personne parmi les conseillers scientifiques du gouvernement n'ait la moindre notion de statistiques ! Il y avait le 22 mars 16 000 personnes officiellement contaminées, il devait donc y en avoir plutôt 500 000 en réalité et sans doute le double en tenant compte des cas asymptomatiques.

En outre, on commençait alors à trouver bon nombre de personnalités atteintes, il y avait 20 députés et 3 membres du gouvernement qui l'étaient, j'écrivais donc le 24 mars que les chiffres indiquées par le gouvernement étaient ridicules et qu'on devait plutôt approcher le million...

Peu après, le 30 mars, l'Imperial College publiait son second rapport dans lequel il donnait ses estimations du nombre de cas réel dans différents pays d'Europe au 28 mars, et trouvait pour la France entre 1,1 et 7,4%, soit entre 700 000 et 5 millions... Mais l'Imperial College était encore en dessous de la vérité !

Je trouvais en tout cas complètement hallucinant qu'on ne puisse pas connaître un chiffre un peu fiable du nombre réel de personnes contaminées, alors que c'est la question capitale et que ça n'est tout de même pas si compliqué à réaliser : on fait quelques milliers de tests sur un échantillon représentatif de la population, dans différentes régions, et on a les résultats. Les instituts de sondage sont capables d'annoncer au dixième près, et sans se tromper beaucoup, les résultats d'élections prochaines, et on n'était pas foutus de donner un chiffre réel du nombre de contaminé qui ne varie pas d'un facteur un à cinquante !

Le 8 octobre, c'est rien moins que le directeur du « Conseil scientifique covid-19 »  du gouvernement, le professeur Delfraissy, qui m'a donné raison : entre 10 et 15%, soit entre sept et dix millions de personnes.

Il s'appuyait pour cela sur une campagne de tests étendus (enfin !) effectués dans l'Oise et le Grand-Est (qui sont parmi les régions les plus touchées, mais j'imagine qu'on en a tenu compte pour extrapoler ces résultats à l'ensemble de la population française). On n'a pas de détail sur cette étude, mais je suppose aussi qu'elle ne concerne pas les cas en incubation, qui sont aussi à considérer pour évaluer le taux d'immunité de la population, ni les personnes guéries, qui ne devaient pas représenter un grand nombre alors qu'on sortait à peine de la phase exponentielle de l'épidémie et que la guérison prend plusieurs semaines. Je garderai par prudence la valeur moyenne du taux indiqué par M. Delfraissy, soit 12% de la population ou huit millions de personnes au 8 avril.

Une autre étude sortait du reste le même jour et semait un peu la confusion, alors qu'elle allait en fait tout à fait dans le même sens. Le syndicat MG France, qui rassemble une grande partie des médecins généralistes, avait fait appel à ses adhérents pour connaître le nombre de personnes qui les avaient contactés pour des symptômes donnant à penser qu'elles avaient le covid-19. En extrapolant à l'ensemble des médecins généralistes, MG France déduisait qu'ils avaient ainsi identifié 1,6 millions de cas confirmés ou probables entre le 17 mars et le 3 avril. Étant donné l'énormité du chiffre annoncé par le professeur Delfraissy, certains journalistes ont donc pensé qu'il y avait eu confusion entre les deux, mais ça n'est clairement pas le cas. MG France explique bien que son étude concerne les personnes qui ont appelé ou consulté un médecin et dont les symptômes semblaient confirmer une atteinte au coronavirus. Elle excluait donc les malades avant le 17 mars, qui étaient assez nombreux, les personnes asymptomatiques ou peu symptomatiques, que l'on sait maintenant très nombreuses, et enfin les personnes qui ont eu la maladie mais n'ont jamais appelé un médecin, nombreuses aussi puisqu'on expliquait partout qu'en cas de symptômes le mieux était de rester chez soi et de prendre du Doliprane, et d'attendre que ça passe sauf si on commençait à avoir des difficultés à respirer. Il y a même un questionnaire en ligne permettant d'établir un diagnostic, à peu près aussi fiable qu'un simple appel à un médecin. Bref en tenant compte de tout cela il est invraisemblable que l'estimation du syndicat fasse plus du cinquième du total réel, et donc on retombe sensiblement sur une estimation de 8 millions de contaminés ou 12% de la population au moins.

Donc, le 8 avril, aucun doute, il y avait près d'une dizaine de millions de personnes contaminées ou immunisées, sûrement pas beaucoup moins. Et le nombre enregistré était alors de 82 000, il y avait donc seulement un cas de personne contaminée sur cent qui était confirmé. C'est dire combien sont futiles l'application pour téléphone censée indiquer qu'on a approché un malade contaminé, ou les capteurs de température utilisés dans certains magasins pour refuser les personnes ayant de la fièvre, ou autres conneries de ce genre !

Tout récemment, le 20 avril, l'Institut Pasteur a publié un rapport estimant un nombre de personnes contaminées de seulement 5,7% de la population, soit 3,7 millions de personnes, pour la date du 11 mai, mais il ne s'agit que d'une étude statistique et on ne voit pas comment accorder ce nombre aux données observationnelles qui commencent à arriver. Voir ma critique de ce rapport.

Une autre étude récente de l'Institut Pasteur porte sur des tests sérologiques dans un lycée de l'Oise (cest sans doute en partie sur cela que s'appuyait le professeur Delfraissy), effectués entre le 30 mars et le 4 avril. 40% des élèves et du personnel scolaire présentaient des anticorps et avaient donc été contaminés, mais par contre la proportion n'était que de 11% dans les familles des enfants. Cela suggère que les enfants sont facilement contaminés, mais contaminent rarement leur entourage, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Le taux d'immunité en dehors du collège semble assez faible pour une région qui a été une des premières touchées, mais il faut remarquer que le confinement a été mis en place dès le 1er mars, quinze jours avant le reste du pays, dans ce « cluster », si bien qu'il pourrait finalement être représentatif du taux d'immunité moyenne dans le pays.

Le taux de létalité de la maladie

Le fait que beaucoup de personnes aient été en contact avec le virus est une excellente nouvelle, d'une part parce que ça nous rapproche du seuil d'immunité de groupe, et plus encore parce que ça signifie que le virus est en réalité beaucoup moins mortel qu'on l'a prétendu... Il est bien évident que si vous avez le même nombre de morts (là-dessus, on ne peut pas beaucoup se tromper) pour beaucoup plus de personnes ayant contracté le virus, c'est que le virus tue beaucoup plus rarement ! Il y a eu d'ailleurs pas mal d'études récentes qui allaient dans ce sens, ayant en particulier noté que les Chinois avaient largement sous-estimé le nombre de contaminés dans leur pays.

Huit millions de personnes contaminées le 8 avril pour 10 869 décès à ce jour, si vous faites le calcul vous arrivez à moins de 0,1% de morts ! En fait, il faut encore tenir compte du décalage : le nombre de personnes atteintes doit être comparé au nombre de morts 19 jours plus tard, soit le 27 avril un peu plus de 23 000 décès, sans compter le nombre de décès à domicile, qui serait de l'ordre de 9 000 jusqu'au 18 avril d'après une seconde étude du syndicat MG France. Donc 34 000 décès au total en extrapolant le nombre de décès à domicile au 27 avril, ce qui donnerait un taux de létalité de 0,42%, on est bien loin des 2% qui étaient annoncés lorsqu'on a mis en place le confinement ! Mais ce taux est sûrement encore biaisé par le fait qu'il y a sans doute une proportion plus importante de personnes âgées contaminées que dans la moyenne de la population au début de l'épidémie, si bien que le chiffre de 0,3% reste sans doute l'estimation la plus correcte.

Et ce chiffre a été confirmé le 14 avril par rien moins que le directeur de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus. En fait pour éviter de le dire et continuer à propager la peur il a juste dit que ce virus était dix fois plus mortel que le virus A(H1N1) de la pandémie qui a démarré au Mexique en 2009. Dit comme cela, c'est vrai que ça fait peur ! Mais si on se renseigne un peu, par exemple en allant voir sur Wikipédia, on trouve que cette pandémie de 2009 a fait un gros flop (on se rappelle des centaines de millions de vaccins inutiles qui ont été commandés) justement parce qu'elle avait un taux de létalité extrêmement bas, compris entre 0,2 et 0,3... pour mille ! Donc dix fois plus pour le covid-19, ça donne entre 0,2 et 0,3 pour cent, j'ai retenu la valeur supérieure pour ne pas risquer d'être accusé de minimiser lampleur du danger !

On peut aussi citer à l'appui d'un taux aussi faible le taux de létalité dans le service du Professeur Raoult, qui se singularise en testant tous ceux qui le désirent : 3081 patients testés positifs et seulement 13 morts, soit moins de 0,5% de mortalité, pour des patients dont une partie se présentent parce qu'ils ont des symptômes. Notons que le Professeur Raoult veut imputer ce faible taux à son fameux traitement à l'hydroxychloroquine, mais que ses adversaires disent justement que c'est parce qu'il traite bon nombre de patients asymptomatiques qui n'ont besoin d'aucun remède pour guérir de ce virus... Pour ce qui nous intéresse ça n'a que peu d'importance : si le traitement est efficace ça veut dire qu'il se généralisera et que le taux de mortalité baissera partout, et si c'est juste le manque de sélection des malades qui est responsable ça veut dire que le taux de mortalité est encore nettement inférieur 0,5% puisqu'il y a tout de même un bon nombre de personnes qui demandent à passer les tests parce qu'ils ont des symptômes.

On peut aussi citer à l'appui d'un taux de létalité très faible les épidémies qui ont eu lieu sur des porte-avions :

— Sur le Charles-de-Gaulle : sur 2300 marins et accompagnants, 1046 testés positifs, aucun mort et deux en réanimation.

— Sur l'USS Theodore Roosevelt, 660 marins testés positifs sur un ensemble de 4800, un mort et aucun en réanimation.

Bien sûr, l'équipage d'un porte-avions n'est pas représentatif de la population, puisqu'il n'y a pas beaucoup de personnes âgées ou en mauvaise santé (mais il n'y a pas non plus d'enfants), mais s'il était représentatif on aurait dû avoir à peu près trois morts et deux en réanimation sur le Charles de Gaulle, deux morts et deux en réanimation sur le Theodore Roosevelt.

Il y a eu aussi une étude allemande à Heinsberg le 9 avril. Sur 12529 habitants, 500 personnes représentatives de l'ensemble de la population ont été testées, 15% étaient positives. En comparant les 15% de la population au nombre de morts, on trouve 0,37% de létalité, là encore sans tenir compte de la surreprésentation probable de personnes âgées au début de l'épidémie.

L'institut Pasteur, dans son étude déjà mentionnée, trouve un taux de létalité de 0,53%, mais on a vu qu'il était sûrement surestimé. Cette étude repose essentiellement sur la comparaison des âges des personnes atteintes sur le navire Diamond Princess, et de celles qui sont mortes, par rapport à ce qui a été observé dans les hôpitaux français.

On peut considérer d'après les différentes études que le taux de létalité s'établit entre 0,2 et 0,5%, et la valeur de 0,3% que j'ai retenue semble une évaluation correcte. Ceci dit ça n'est pas rien : s'il faut que 70% de personnes aient contracté le virus pour que le peuple soit immunisé, avec un taux de létalité de 0,3% ça fait quand même la mort de 0,2% de la population, soit à peu près 120 000 personnes. Mais on est tout de même loin des plus de 500 000 que nous annonçait le premier rapport de l'Imperial college !

Les personnes en réanimation

Intéressons-nous maintenant aux personnes qui ont besoin de soins intensifs en réanimation, puisqu'en dehors du taux de létalité c'est ce qui a fait prendre conscience du danger de l'épidémie, avec le risque de déborder complètement les capacités d'accueil...

Là encore, il suffit de comparer le nombre de personnes ayant contracté le virus le 8 avril, environ huit millions, avec le nombre de personnes ayant eu besoin d'une réanimation. Cette fois, il y a d'après les études un décalage d'environ douze jours en moyenne entre le moment où on contracte le virus et celui où on peut nécessiter des soins intensifs. Je n'ai pas trouvé le cumul des cas en réanimation, on trouve juste sur le site de la Santé publique le nombre de patients actuellement en réanimation. Par contre, j'ai lu qu'il y en avait eu 8 318 en tout au cours de mois de mars, et aucun avant. On peut donc comparer ce nombre à celui des morts à la date du 7 avril : 10 328, portés plutôt à 15 000 en tenant compte des décès à domicile. Le nombre de cas passant en réanimation serait à peine supérieur à la moitié du nombre de morts. Ça fait donc un taux de personnes en soins intensifs de 0,16%, on est encore plus loin des 10% qu'on nous annonçait il y a peu ! Il y a tout de même de quoi surcharger les services de réanimation, et il était donc nécessaire de prendre des mesures pour ralentir l'épidémie, mais il ne faut pas non plus en faire trop. S'il faut que 40 millions de personnes en France aient été contaminées pour atteindre le seuil d'immunité de groupe, ça représente 65 000 personnes qui devront passer en réanimation, dont 20 000 l'ont déjà fait, ça n'est pas quelque chose d'insurmontable !

Le taux de reproduction de base

Le dernier chiffre inéressant est le taux de reproduction de base de l'épidémie, le fameux R0. C'est le nombre moyen de personnes auxquelles un porteur du virus le transmet. S'il est grand, le virus se propage très vite, le nombre de malades étant multiplié par ce facteur à chaque « génération » (et le temps d'une génération dépend du temps pendant lequel un malade est contagieux), et s'il est inférieur à un il y a de moins en moins de malades et le virus finit par disparaître. Ce taux n'est pas fixe, puisqu'il dépend des caractéristiques de la population : il sera naturellement beaucoup plus important dans les grandes villes où la densité de population est très grande que dans les campagnes.

Et le taux d'immunité de la population fait aussi baisser le taux de reproduction... Le « pic » de l'épidémie, correspondant au nombre maximum de nouveaux malades, se situe quand le taux de reproduction est égal à un.

On a longtemps estimé que ce taux était à l'origine proche de trois, mais des études récentes suggèrent qu'il serait bien plus important, de l'ordre de six. Et cela n'est pas vraiment une mauvaise nouvelle, puisque si le taux de reproduction a été sous-estimé ça signifie que le nombre de personnes atteintes l'a aussi été.

Bien évidemment, le confinement et toutes les mesures de distanciatino sociale ont pour but de faire baisser le taux de reproduction du virus, et on estime qu'en France depuis le confinement il est tombé à 0,5. C'est une très bonne chose pour avoir permis de décharger les services de santé, mais maintenant j'ai du mal à comprendre qu'on veuille absolument maintenir ce taux à une valeur inférieure à un, donc avec un virus de moins en moins présent, et qu'on regrette en même temps que le taux d'immunité de la population ne soit pas très élevé ! Il s'agit juste de ne pas avouer qu'avec cette stratégie la population ne sera jamais immunisée, qu'on ne pourra compter que sur un vaccin pour être débarrassés de ce virus, et qu'on devra donc maintenir ces mesures aussi longtemps qu'on ne l'aura pas.

C'est une façon de voir l'avenir, mais il faudrait avoir la décence de le dire à la population !

Robert Alessandri



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Ce texte a été lu fois depuis le 27/04/2020